ICIBA : Intérêts des Cultures Innovantes de Blé Associé, un projet innovant

Expertise Chambre

Résultats de trois ans de recherches sur l’intérêt du blé tendre associé avec des plantes compagnes pour lutter contre les pucerons d’automne vecteur de la JNO et de la maladie du pied chétif.

Le projet ICIBA (Intérêts des Cultures Innovantes de Blé Associé), prend fin cette année et nous livre ses résultats

Ce projet a émergé en 2020 en région Centre val de Loire en réponse à un appel à projet de FranceAgriMer. Il fait suite à l’interdiction des traitements de semences à base de néonicotinoïdes, en septembre 2018, qui a rendu difficile la gestion des insectes d’automne sur céréales. Or les pucerons d’automne et cicadelles occasionnent d’importants dégâts sur la production de blé, du fait des viroses qu’ils transmettent. D’où l’idée d’évaluer une méthode de lutte alternative : l’association du blé à des plantes compagnes dès l’automne. L’hypothèse de départ postule que ces couverts peuvent perturber les ravageurs d’automne et/ou favoriser leurs ennemis naturels (hyménoptères parasitoïdes, syrphes, coccinelles…) en leur apportant des ressources en nectar et en hôtes alternatifs. Différents partenaires techniques et scientifiques se sont donc rassemblés pour travailler sur cette question : les chambres départementales d’agriculture de l’Indre et du Loiret et régionale Centre-Val de Loire, la FDGEDA 18, la Société Coopérative d’Eure-et-Loir (SCAEL), FREDON Centre-Val de Loire, l’Institut Agro Rennes Angers ainsi que le Laboratoire d’Eco-Entomologie.

Mise en place du projet sur le terrain

La première et la deuxième année du projet, des essais en micro-parcelles ont d’abord permis d’évaluer différentes espèces candidates pour l’association avec le blé et d’en faire une sélection plus restreinte, selon des critères de levée, développement et impact sur le résultat du blé. Les quatre essais mis en place dans le 18, 28, 36, et 45 ont abouti au choix du pois, de la féverole et de la vesce pour la suite du projet. Ces espèces ont ensuite été implantées en grandes bandes (20 m x 60 m minimum) la deuxième et troisième année du projet, pour en mesurer les effets sur les ravageurs d’automne et les auxiliaires permettant de les réguler. Sur les trois années, 25 essais en bandes ont été suivis.

Les couverts étaient semés dans la mesure du possible début août pour qu’ils soient suffisamment développés lors de l’arrivée des insectes d’automne, en travail simplifié ou en direct pour maintenir la fraîcheur du sol et assurer la réussite de la levée. Le blé était semé en direct dans les couverts à l’automne, ou seul dans la modalité témoin. Les arthropodes ont été suivis régulièrement à l’automne par des piégeages (par des cuvettes jaunes, plaques jaunes engluées et pièges Barber), par des observations visuelles directes et par aspirations. Des analyses biochimiques ont été menées pour étudier l’alimentation des guêpes parasitoïdes des pucerons et déterminer si les couverts leur apportaient des ressources. Le rendement et le taux de protéine du blé ont été mesurés à la récolte.

Les principales conclusions du projet

D’un point de vue agronomique, la pratique a, dans beaucoup de cas, pénalisé le rendement du blé et n’a pas eu d’effet sur sa qualité. Le peu de présence de viroses dans les parcelles ne permet pas de conclure sur l’impact des associations. Il semble y avoir une plus forte présence de JNO sur les bandes de blé pur par rapport au blé associé mais les données sont insuffisantes pour conclure statistiquement. Les cultures associées ont, en revanche, souvent permis de limiter les vols de pucerons et cicadelles et pu favoriser certains auxiliaires tels que les punaises anthocoridae ou les carabes. La variabilité des résultats entre les sites, et la faible pression en pucerons durant le projet ne permettent pas de tirer de conclusions fermes, mais les résultats sur les insectes d’automne restent encourageants. Parmi les espèces de couverts étudiées, la féverole semble présenter plus d’intérêt par rapport aux autres : sa rusticité lui permet de mieux résister aux dégâts de ravageurs ainsi qu’aux herbicides, et d’avoir une meilleure levée.

La faisabilité de cette pratique pour les agriculteurs reste limitée par plusieurs freins : besoin d’un semoir à semis direct, incompatibilité avec la gestion phytosanitaire du désherbage, levée des couverts souvent difficiles en période estivale. D’un point de vue économique, dans des cas de faible présence de virose et sans récolte du couvert associé, où les avantages générés par l'association ne parviennent pas à compenser les coûts de sa mise en place, la pratique semble pénalisante. Dans d’autres cas (forte présence de virose, ou encore conditions limitantes en azote), les cultures associées au blé pourraient avoir un intérêt plus marqué.

 

Hyménoptère en train de parasiter un puceron. Source : INRAe

Cicadelle Psammotettix alienus
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Tomasz

Puceron Rhopalosiphum padi
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Tomasz

 

contact
Jean GUÉRINEAU 
Conseiller Grandes cultures - Chambre d'agriculture du Loiret
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